Le 24 juin dernier, VIA Don Bosco lançait un appel. L’ONG, en partenariat avec La Libre et Het Nieuwsblad, recherchait deux lecteurs ou lectrices pour partir en Bolivie. Deux semaines plus tard, 652 personnes s’étaient portées candidates. Début septembre, les deux sélectionnées, Audrey Salina et Sara Vermeulen, se sont envolées pour Santa Cruz de la Sierra. Avec une mission : porter un regard critique sur les programmes de VIA Don Bosco. Un voyage intense qui a bousculé les certitudes.
On connaît la Bolivie pour ses sommets, ses alpacas, ses tenues colorées. VIA Don Bosco la connaît pour ses défis.
Près de 37% de la population vit avec moins de 2 dollars par jour (Banque Mondiale, 2021). Depuis l’épidémie de COVID-19, l’économie informelle est passée de 60 à 80% et il est devenu très compliqué pour les jeunes de trouver un emploi stable. Les entrepreneurs, qui peinent à faire légaliser leur entreprise, restent dans l’informalité. Dans le même temps, le pays fait face à d’immenses défis : les violences de genre, y compris les féminicides, restent très présentes ; les effets du changement climatique se font durement ressentir (dans le département de Santa Cruz, les précipitations ont diminué de 27% en 40 ans) ; et la culture de la coca, contrôlée par l’Etat en vue de répondre au marché local (elle est mâchée et utilisée comme stimulant léger par les peuples des Andes depuis plus d’un millénaire), détourne parfois de l’école les jeunes en quête de revenus pour leur famille.
Dès leur arrivée le 9 septembre au matin, l’équipe de VIA Don Bosco a entraîné Audrey et Sara dans un périple qui les a menées de Santa Cruz à La Paz en passant par Yapacaní et Cochabamba. Un programme chargé fait de visites chocs et de rencontres bouleversantes avec les écoles et les associations locales partenaires de VIA Don Bosco.
A chaque étape, Audrey et Sara ont eu droit à une mise en contexte : quelles sont les difficultés mais aussi les opportunités de la région visitée ? Quelles sont les formations organisées pour y répondre ? Quelles sont les caractéristiques du marché de l’emploi local ? Quelles sont les stratégies mises en œuvre par le Bureau d’Emploi de VIA Don Bosco pour accompagner la mise à l’emploi des jeunes diplômés ?
« Même si c’est difficile, c’est possible ! »
« Le courage des jeunes, l’engagement des professeurs, c’était très marquant, raconte Audrey. Et puis l’optimisme de tous ces gens que nous avons rencontrés : même si c’est difficile, c’est possible ! On retrouvait ça partout. »
Sara complète : « Je n’oublierai jamais les personnes que nous avons rencontrées : des femmes fortes, dans un monde qu’elles qualifient elles-mêmes de « machiste ». Je pense à la directrice de l’école Miguel Magone de Santa Cruz et à ses collègues qui brisent les stéréotypes sur les professions traditionnellement masculines ou féminines. Nous avons rencontré des jeunes femmes en classe de mécanique, des garçons futurs esthéticiens. D’anciennes étudiantes sont devenues enseignantes comme Angelica, professeure en électromécanique. »
En tant que partenaires médias, La Libre et Het Nieuwsbald étaient eux aussi du voyage. « Ce qui m’a marquée dans ce pays qui rencontre beaucoup de problèmes, c’est que les partenaires locaux de VIA Don Bosco s’impliquent sans compter dans la formation des jeunes dont ils s’occupent, confie Sophie Devillers, journaliste spécialiste des questions « planète » pour La Libre. Je pense à Sor Neda, la directrice de l’Institut Maria Auxiliadora à Yapacaní, qui, sans relâche, accompagne individuellement les jeunes filles de l’école, avec des histoires personnelles souvent très dures. Je pense aussi à Yrland, professeur en électromécanique. Il a créé une entreprise qui sert de tremplin aux jeunes pour entrer plus facilement dans le marché du travail. Tout cela avec beaucoup d’humilité, comme si c’était naturel. »
« Ici plus qu’ailleurs, la mise en place de filières de formation adaptées, l’accompagnement vers le marché du travail, la mise en contact avec des employeurs, l’aide à la rédaction d’un CV, toutes ces choses très concrètes, tout cela porte ses fruits, complète Jens Vancaeneghem, journaliste pour Het Nieuwsblad qui relève aussi l’importance de la collaboration avec les entreprises locales. Nous avons rencontré un garagiste à Santa Cruz, Rogelio Sahonero. Il s’était engagé à former deux stagiaires par an mais, lors de notre visite, il en avait huit. Lui-même a eu beaucoup de mal à se frayer un chemin vers l’emploi lorsqu’il était jeune. Il est donc très sensibilisé. »
L’histoire qui a le plus marqué le journaliste ? Celle de Laura, une ex-élève devenue opticienne et qui fera prochainement l’objet d’un film. « Son histoire est dramatique mais grâce à la formation qu’elle a suivie et à sa volonté, Laura vole aujourd’hui de ses propres ailes. »
Goedele Liekens, ambassadrice VIA Don Bosco
Goedele Liekens, BV et ambassadrice « Good Will » depuis vingt ans pour l’UNFPA – l’agence des Nations Unies en charge des questions de santé sexuelle et reproductive – accompagnait également l’ONG. Un regard expert précieux dans un pays où les grossesses précoces constituent un frein majeur à l’éducation des jeunes filles. « La Bolivie est, au niveau mondial, dans le triste peloton de tête en matière de féminicides et de violences faites aux femmes. L’éducation y est donc particulièrement importante pour les filles. Si elles peuvent étudier, elles peuvent trouver un emploi, devenir indépendantes. Elles sont plus fortes. Je pense à Daysi, cette jeune fille que j’ai suivie pendant quelques jours : malgré sa situation très difficile, elle rayonne de bonheur parce qu’elle peut aller à l’école. Si cela n’existait pas, combien de talents seraient perdus. »
Prochaine étape pour Sara et Audrey : le debriefing avec les équipes de VIA Don Bosco. « Elles vont nous apporter un retour non expert sur ce qu’elles ont vu, explique Eric Henrotte, Head of Communication & Fundraising. Nous attendons beaucoup de ce regard neuf pour sortir de notre zone de confort et enrichir notre action. »