Pour justifier l’interdiction faite aux filles enceintes de suivre les cours, l’ancien président de la Tanzanie, John Magufili, avait déclaré : « Les comportements immoraux n’entreront pas dans nos écoles. » Le fait que ces mêmes écoles accueillent les garçons parfois responsables de ces grossesses ne semblait pas le préoccuper. On ne peut dès lors que se réjouir de l’abolition de cette loi injuste et stigmatisante par l’actuelle présidente Samia Suluhu Hassan.
Il y a cependant une limite à cette avancée : le nouveau texte de loi prévoit que ces jeunes filles reprennent uniquement leurs études pendant les deux années suivant la naissance de leur enfant. Après cela, elles devront recommencer leur formation, sous prétexte qu’elles auraient perdu la maîtrise de la matière enseignée.
Une nouvelle barrière qui ne jouera certainement pas en leur faveur. Car il n’est pas évident pour ces jeunes filles de reprendre leurs études aussi rapidement après la venue au monde d’un enfant. Depuis cinq ans, les écoles partenaires de notre programme en Tanzanie ont travaillé dur pour améliorer les possibilités d’éducation des filles et éliminer les freins à leur scolarité. Cet effort fut couronné de succès puisqu’actuellement, 40 % des 1 274 élèves des deux écoles sont des filles !
À l’origine de ce succès, on trouve la campagne Binti Thamani lancée en 2017. Financée et encadrée par VIA Don Bosco, elle tire sa force de son approche multidisciplinaire pour s’attaquer aux inégalités de genre. Au travers cette campagne, nous travaillons sur différents aspects :
La sensibilisation
Via des campagnes de sensibilisation, nous travaillons à l’élimination des stéréotypes de genre à l’école, mais aussi chez les parents, au sein des communautés et dans les entreprises.
Les compétences humaines
Une formation aux compétences humaines (les ‘life skills’ en anglais) ouvre le regard des jeunes. Elle les encourage à se comporter de manière plus responsable les un∙es envers les autres et à développer un sens du respect plus profond.
La collaboration avec les pouvoirs publics
Via une coopération active avec les autorités locales, nous sensibilisons les jeunes à l’importance
du rôle des hommes et des femmes politiques en matière d’inclusion. Nous les mettons également
au défi d’en faire plus.
L’infrastructure et le fonctionnement des écoles
De gros efforts ont été faits pour adapter les infrastructures et le fonctionnement des écoles avec,
notamment, la construction de toilettes et de vestiaires séparés, un accompagnement social spécifique et une offre plus large de matières et d’options accessibles aux filles.
La mise en réseau
Un réseau de soutien a été mis en place pour les écoles, tant au niveau national qu’international.
Celui-ci comprend des organisations telles que des ONG, des pouvoirs publics, des initiatives privées
et des entreprises. Leur soutien se traduit par des contributions financières, la fourniture de matériel,
l’échange d’expertises...
L’accès à l’emploi
Nous veillons particulièrement à l’accompagnement des filles sur le marché du travail, que ce soit auprès des entreprises ou via le démarrage d’une activité indépendante. Il n’est pas facile de lutter contre l’exclusion sociale, mais lorsque les filles ont la possibilité de démontrer leurs compétences techniques et professionnelles, les opinions finissent par changer.
Grâce à des interventions dans leurs frais de scolarité, les jeunes tanzaniennes ontla possibilité de s’épanouir et d’apprendre un métier. Elles travaillent dans les ateliers au côté des garçons et, petit à petit, les attitudes traditionnelles cèdent la place à des croyances plus nuancées, tant chez les élèves que chez les enseignant∙e∙s. Il est à noter que les ateliers de notre école partenaire à Dodoma sont dirigés par des femmes : un choix assumé de la direction en raison des compétences sociales et relationnelles de ces femmes dirigeantes. Dans notre nouveau programme à cinq ans, nous renforcerons notre action sur le terrain pour encore davantage d’inclusion sociale. Plus un∙e seul∙e jeune ne devrait perdre des opportunités de développement ou être stigmatisé∙e par des mécanismes d’exclusion. L’éducation change le monde. Demandez donc aux filles de nos écoles en Tanzanie !